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l’accent de Verlaine était dans ces adorables vers des Fêtes galantes :


Le soir tombait, un soir équivoque d’automne,
Les belles se pendant rêveuses à nos bras,
Dirent alors des mots si spécieux tout bas,
Que notre âme depuis ce temps tremble et s’étonne.


Ce n’était plus l’horizon immense ouvert par les inoubliables portes de Baudelaire, c’était, sous un clair de lune, une fente entrebâillée sur un champ plus restreint et plus intime, en somme particulier à l’auteur qui avait, du reste, en ces vers dont des Esseintes était friand, formulé son système poétique :


Car nous voulons la nuance encore,
Pas la couleur, rien que la nuance
.   .   .   .   .   .   .   .   .   .   .   .
Et tout le reste est littérature.


Volontiers, des Esseintes l’avait accompagné dans ses œuvres les plus diverses. Après ses Romances sans paroles parues dans l’imprimerie d’un journal à Sens, Verlaine s’était assez longuement tu, puis en des vers charmants où passait l’accent doux et transi de Villon, il avait reparu, chantant la Vierge, « loin de nos jours d’esprit charnel, et de chair triste ». Des Esseintes relisait souvent ce livre de Sagesse et se suggérait devant ses poèmes des rêveries clandestines, des fictions d’un amour occulte pour une Madone byzantine qui se muait, à un certain moment, en une Cydalise égarée dans notre siècle, et si mystérieuse et si troublante, qu’on ne pouvait savoir si elle aspirait à des