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que mieux eût valu pour eux que leur mère n’eût point mis bas.

En effet, c’était de la gourme, des coliques et des fièvres, des rougeoles et des gifles dès le premier âge ; des coups de bottes et des travaux abêtissants, vers les treize ans ; des duperies de femmes, des maladies et des cocuages dès l’âge d’homme ; c’était aussi, vers le déclin, des infirmités et des agonies, dans un dépôt de mendicité ou dans un hospice.

Et l’avenir était, en somme, égal pour tous et, ni les uns, ni les autres, s’ils avaient eu un peu de bon sens, n’auraient pu s’envier. Pour les riches, c’étaient dans un milieu différent, les mêmes passions, les mêmes tracas, les mêmes peines, les mêmes maladies, et c’étaient aussi les mêmes jouissances médiocres, qu’elles fussent alcooliques, littéraires ou charnelles. Il y avait même une vague compensation à tous les maux, une sorte de justice qui rétablissait l’équilibre du malheur entre les classes, en dispensant plus aisément les pauvres des souffrances physiques qui accablaient plus implacablement le corps plus débile et plus émacié des riches.

Quelle folie que de procréer des gosses ! pensait des Esseintes. Et dire que les ecclésiastiques qui ont fait vœu de stérilité ont poussé l’inconséquence jusqu’à canoniser saint Vincent de Paul parce qu’il réservait pour d’inutiles tortures des innocents !

Grâce à ses odieuses précautions, celui-là avait