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introduction.

leur filiation par voie d’évolution progressive[1] ? Le plus grand effort des sciences naturelles dans notre siècle est d’avoir tenté de répondre à ce problème et, presque du premier coup, d’avoir obtenu une solution qui porte le caractère d’une vérité rationnelle nécessaire, et qui s’appuie, à bien des égards, sur la vérification expérimentale. « Il reste bien des lacunes entre les espèces d’époque consécutive, dit M. Albert Gaudry, en terminant ses Considérations générales sur les animaux fossiles de l’Attique[2], il en résulte qu’on ne peut encore démontrer d’une manière positive que les espèces sont descendues les unes des autres : mais les vides n’existent-ils pas dans nos connaissances plutôt que dans la série des êtres fossiles ? Quelques coups de pioche donnés aux pieds des Pyrénées, des monts Himalaya et du Pentélique,

  1. M. Pouchet, dans une note présentée récemment à l’Académie des sciences (31 décembre 1866), disait avec beaucoup de justesse : « … Il est un fait que nul géologue me conteste aujourd’hui, c’est que chaque période du globe a eu ses races d’animaux et des plantes ; or dans l’état actuel de la science on ne peut admettre que deux hypothèses : l’hétérogénie ou la mutabilité. » Presque tous les naturalistes, sauf l’étroit et orthodoxe Cuvier, génie singulièrement surfait, ont eu à un moment de leur vie la foi scientifique, la foi à la filiation. Nous aurions donc pu accumuler les citations. Mais on trouvera avec raison que cette Introduction est déjà fort longue, et nous nous contenterons de citer quelques lignes d’Is. Geoffroy, qui, dans le programme de ses leçons sur l’Espèce (1855), appuyait dans les termes suivants la thèse de la filiation : « En paléontologie, à la thèse de la variabilité limitée correspond une hypothèse simple et rationnelle, celle de la filiation : à la doctrine de la fixité deux hypothèses également compliquées et invraisemblables, celle des créations successives et celle dite de translation. »
  2. Paris, 1866, p. 66.