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LE PROBLÈME DES ORIGINES.

a pour condition nécessaire la conversion permanente des forces qu’ils personnifient.

M. Littré lui-même, malgré l’apparente élimination que nous avons signalée plus haut, avait dit, peu de temps auparavant, dans une des plus belles pages qui soient sorties de sa plume, — je dirai même, qu’offre notre littérature : — « Leurs cosmogonies, (celles des astronomes), n’ont rien de commun que le mot avec celles des poëtes primitifs et des antiques traditions. Elles ne prétendent en aucune façon expliquer ni comment la matière est sortie du néant, ni comment, de l’état de chaos, elle a passé à un ordre meilleur. Pour la science moderne la matière est, je ne dirai pas éternelle, mais sans commencement, c’est-à-dire qu’on ne peut lui assigner un commencement ; et elle est telle avec ses propriétés de pesanteur, de caloricité, d’électricité, de lumière, d’affinité, de vie, dont elle ne peut jamais être dépouillée. Car la science moderne qui renonce à concevoir tout commencement à la matière, ne renonce pas moins rigoureusement à concevoir un commencement à ses propriétés. Ce fut la tentation et la tentative de la pensée juvénile et inexpérimentée, d’imaginer des modes sous lesquels elle se représentait la matière ou primitivement produite ou subséquemment tirée de l’inertie, et animée de facultés. L’illusion s’est dissipée[1]… » Eh bien, je

  1. Littré, Étude sur le Cosmos de M. de Humboldt (Revue germanique, 1858, no 5).