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de la Grèce et presque complètement fermée dans les longues périodes subséquentes de stagnation, ou tout au moins de gyration intellectuelle, la larve humaine s’est activement alimentée et elle a mué non moins activement. Un tégument de bonne dimension fut rejeté au seizième siècle, un autre vers la fin du dix-huitième, et depuis cinquante ans le développement extraordinaire de toutes les parties des sciences naturelles a répandu parmi nous un aliment mental si nutritif et si stimulant, qu’une nouvelle métamorphose semble imminente.

Mais souvent ces transformations s’accompagnent de convulsions, de malaise et de débilité, quelquefois même de désordres plus graves ; en sorte que tout bon citoyen doit se sentir tenu de faciliter l’évolution, et, s’il n’a dans ses mains qu’un scalpel, de s’en servir pour faciliter de son mieux le débridement de cette enveloppe qui va se rompre.

C’est sur ce devoir qu’est fondée mon excuse pour la publication de ces essais. Car on reconnaîtra que quelques notions sur la position de l’homme dans le monde animé sont un indispensable préliminaire pour l’intelligence véritable de ses relations avec l’univers ; et ce dernier problème se résoudra à son tour, mais à la longue, en une enquête sur la nature et l’étroitesse des liens qui rattachent l’homme à ces êtres singuliers dont l’histoire a été esquissée aux pages qui précèdent[1].

Au premier coup d’œil, l’importance d’une telle enquête est manifeste ; mis en face de cette image effacée de lui-même, l’homme, celui-là même qui pense le moins, a conscience d’une sorte de répulsion qui n’est pas tant due, peut-être, au dégoût que lui inspire l’aspect de ce qui

  1. On comprend que, dans cet Essai, je n’ai choisi pour les citer, parmi la grande quantité de travaux qui ont été publiés sur les singes anthropomorphes, que ceux qui m’ont paru d’un intérêt actuel.