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PRÉFACE DE L’AUTEUR

titi, là en chimpanzé, ces mêmes causes ont été suffisantes pour, de la même souche, faire évoluer (to evolve) l’homme.

Quant à la question de savoir si les causes naturelles peuvent ou non produire ces transformations, je ne m’en mêle pas, satisfait de la laisser aux mains puissantes de M. Darwin.

Ayant ainsi fait la part aux critiques de mes adversaires, un mot ou deux maintenant en réplique à celles qui me viennent de régions amies.

Mon excellent traducteur, par exemple, est l’un des nombreux écrivains qui ont blâmé (p. 252) l’usage des mots abîme et gouffre, quand je parlais des différences qui existent entre l’homme et les singes.

Mais ces mots rendent exactement ce que je dois en comprendre.

Il m’arriva un jour de séjourner durant de nombreuses heures, seul, et non sans anxiété, au sommet des Grands-Mulets. Quand je regardais à mes pieds le village de Chamounix, il me semblait qu’il gisait au fond d’un prodigieux abîme ou gouffre. Au point de vue pratique, le gouffre était immense, car je ne connaissais pas le chemin de la descente et si j’avais tenté de le retrouver seul, je me serais infailliblement perdu dans les crevasses du glacier des Bossons ; néanmoins je savais parfaitement que le gouffre qui me séparait de Chamounix, quoique dans la pratique infini, avait été traversé des centaines de fois par ceux