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des singes anthorpomorphes

N’Pongues (nom que, selon lui, se donnent les naturels du pays, ainsi que le reconnaît le docteur Savage) appellent l’embouchure du Gabon N’Pongo,

Il est si facile, dans les relations avec les sauvages, de confondre leurs applications des mots aux choses, que l’on est d’abord disposé à croire que Battell a confondu le nom de la région où ce « grand monstre » abonde encore, avec le nom de l’animal lui-même. Mais il est tellement exact en d’autres matières (et notamment dans le nom qu’il donne au « plus petit monstre ») que l’on hésite à l’accuser d’une erreur. D’un autre côté, nous trouverons un voyageur, une centaine d’années après Battell, qui cite le nom de Boggoe comme étant appliqué à un grand singe par les habitants d’une partie toute différente de l’Afrique, la sierra Leone.

Mais je laisserai cette question à résoudre aux voyageurs et aux philologues. Je ne m’y serais pas arrêté aussi longtemps sans le rôle curieux joué par le mot « pongo » dans l’histoire récente des singes anthropomorphes.

La génération qui succéda à Battell vit le premier de ces singes qui ait jamais été amené en Europe, ou du moins le premier dont la visite trouva un historien. Dans le troisième livre de Tulpius qui a pour titre : « Observationes medicæ » publié en 1641, le cinquante-sixième chapitre est consacré à ce qu’il appelle Satyrus indicus, « nommé par les Indiens orangs-outangs ou hommes des bois, et par les Africains quoias morrou. » Il donne un excellent dessin (fig. 2), fait évidemment d’après nature, spécimen de cet animal « nostra memoria ex Angola delatum, » offert à Frédéric-Henri, prince d’Orange. Tulpius dit qu’il était aussi grand qu’un enfant de trois ans, aussi fort qu’un enfant de six ans, et que son dos était couvert de poils noirs. Il s’agit évidemment d’un jeune chimpanzé.