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introduction.

les hommes des époques les plus reculées parmi ceux qui nous ont laissé des documents positifs de leur existence sur le sol européen, n’étaient pas supérieurs aux Mincopies, aux Australiens et aux Esquimaux, si même — et telle est l’opinion de M. Roujou[1] — ils ne lui étaient inférieurs. Or, à moins de supposer que l’homme civilisé n’a pas d’ancêtres, il faut reconnaître en tout cas que nos ancêtres se rapprochaient infiniment plus que nous du gorille, qui se construit des huttes, et de l’orang-outang, qui se façonne des bâtons dans les bois de Bornéo ; on peut donc se demander s’il y a eu pour l’homme, avant l’âge de pierre, un âge où le bois seul était en usage, mais déjà la date des êtres qui se fabriquaient de grossiers instruments de silex est incalculable ; d’ailleurs la nature même de l’outil ne nous permettra sans doute jamais d’en décider, si tant est que le mot jamais, en matière de découvertes paléontologiques, puisse trouver une place légitime. Mais il y a un âge de bois pour les singes, et même, selon sir J. Lubbock, un âge de pierre.

« L’homme faible et chétif, errant et nu, sans industrie et presque sans armes, » selon les expressions de M. Broca, voilà l’homme qu’il faut comparer aux animaux, et non celui qui, poussé par l’instinct de son développement souverain, agrandit chaque jour la distance qui l’en sépare, en détrui-

  1. A. Roujou, Recherches sur l’âge de pierre quaternaire dans les environs de Paris. Excellent résumé très-précis et très-savant de la question.