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ENQUÊTE

j’eus de ne pas l’admirer assez, tout en l’admirant beaucoup. Les hommes de lettres ont dû comprendre ce langage et deviner tout de suite pourquoi le poète me voulait tant de mal. Mais le public, étranger à nos mœurs littéraires, a pu croire raisonnablement qu’on me reprochait des torts d’un tout autre ordre, plus graves à ses jeux, et que, certes, je n’eus jamais.

Dans son zèle à combattre ceux qui, aimant la poésie, ne l’aiment point toute en lui, M. Leconle de Lisle a déclaré « qu’il estime peu mon caractère ». C’est assurément du caractère de ma littérature qu’il veut parler. Car il est hors d’état de rien blâmer dans ma vie privée, et je lui défends bien de le faire.

Si, hors mes articles, il croit avoir à se plaindre de moi, qu’il le dise et parle avec franchise et clarté. Je saurai lui répondre. En attendant, respectueux et désarmé devant un homme de son âge et de son talent, je n’accepte qu’avec regret l’obligation où il m’a mis de relever publiquement la légèreté pitoyable de ses propos.

Veuillez agréer, monsieur le rédacteur, etc.

Anatole France.



Avant de reproduire cette lettre, j’avais pensé qu’il était de mon devoir strict de la communiquer à l’illustre maître qu’elle vise.

Voici la lettre que M. Leconte de Lisle m’a adressée à la suite de cette communication :