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ENQUÊTE

conséquent, si M. Zola n’avait jamais eu l’idée de traiter la passion génésique, il eût gardé de cent à mille lecteurs convaincus et légitimes, ce qui n’eût rien retranché à sa valeur d’écrivain et l’eût gardé des raisonnements piteux. Il a donc mauvaise grâce de reprocher la vente restreinte de ceux qui s’adressent expressément à une petite élite.

Par un autre procédé bizarre de sa critique, M. Zola aime afflrmer que ses adversaires ne présentent pas d’œuvre à leur actif. Cette accusation semble d’une gratuité un peu naïve. Supposons un instant, en effet, que le symbolisme ait précédé le naturalisme et qu’il eût plu à M. Jean Moréas, puisque M. Zola le salue maître d’École, de dire perpétuellement que le naturalisme ne possédait pas d’œuvre à son actif malgré les Assommoir, les Curée, les En ménage, les Lucie Pellegrin, les Madame Mœuriot, etc… M. Zola eut, en quelques lignes de belle virulence, accusé M. Jean Moréas de mauvaise foi. Pourquoi nier dès lors le titre d’œuvre aux Moralités légendaires de Laforgue, à l’Anceus de M. Griffin, aux Poèmes Romanesques de M. de Régnier, aux Hantises, aux Lauriers sont coupés de M. Dujardin, aux contes de M. Bernard Lazare et aux livres de tels et tels à qui il ne manque, pour gagner la gloire de M. Barrès, que de faire antichambre chez les vieilles amies du critique à la mode.

Peut-être M. Zola répondra-t-il n’avoir rien lu de ces écrits-là. Bien que cette défaite prenne de l’usage, elle implique au moins une assez folle légèreté. Il appartient à l’ignorant de se taire, non de se vanter de son ignorance et de s’en faire un mérite.

En définitive, ce candidat à l’Académie renie depuis quelque temps les idées loyales et vigoureuses qui nous l’avaient jadis rendu si cher. Pour conserver sa place dans l’admiration publique, il emploie, à se débattre, les plus vulgaires procédés du reportage, flagorneur envers les