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ENQUÊTE

a eu le dessus longtemps ; puis ce fut le tour du Naturalisme ; maintenant l’engoûment semble aller à une formule encore mal définie, dont on groupe les forces embryonnaires sous l’étiquette Symbolisme. Mais ni le Naturalisme, ni le Romantisme, ni toutes les autres formes littéraires dont on retrouve l’époque brillante en remontant l’histoire, ne sont abolis. Diminués ou diminuant, oui ; destitués de l’importance prépondérante et, d’après moi, démesurée qu’ils ont eue au temps de leur éruption, oui ; mais supprimés, jamais ! réduits à des proportions normales, mis à leur rang, nettoyés de leurs exagérations, classés (d’où vient classique) et prêts à servir (ceci est l’essentiel) à tout homme de génie, voire de talent, à qui il plaira, n’importe quand, les reprendre pour en faire les règles directrices d’une grande œuvre.

» Je ne puis donc comprendre ces affirmations de la plupart de vos interviewés : Le Naturalisme est fini, bien fini ! qu’en ce sens : Le Naturalisme n’est plus le préféré ; il a fait son temps comme école dominante ; il a eu tout l’espace qu’il fallait pour son épanouissement ; l’esprit changeant du public en a été saturé, en est las et demande autre chose ; qu’on fasse son bilan ; qu’on balance son actif et son passif ; qu’on fixe ses caractéristiques, et qu’à son tour, ainsi ventilé, il devienne classique, ne pouvant plus désormais servir, sans paraître odieux, aux médiocres pasticheurs, mais toujours prêt pour les artistes supérieurs,