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SUR L’ÉVOLUTION LITTÉRAIRE

jours lui-même, jamais homme de lettres. Ses derniers vers sont d’une simplicité de sentiment adorable. On l’en blague un peu ; mais ça ne fait rien, c’est bien, allez… Moi, je crois qu’on y reviendra tout à fait, à la simplicité, et je ne crois pas du tout à l’avenir d’un style compliqué, bizarre, fabriqué à coups de dictionnaire !

Il y a une chose qui m’attire beaucoup, c’est la poésie populaire ; je ne veux pas parler des chansons de café-concert (quoique j’admire aussi le talent réel de Bruant, par exemple), mais je veux parler de cette grande poésie des campagnes, des paysans, un peu mélancolique et douce, quelquefois même très brutale, mais toujours naïve et simple : Là, il n’y a pas de complication de style, le vers varie suivant l’impression à rendre, la rime n’est quelquefois qu’une simple assonnance… En Angleterre, en Allemagne, on a beaucoup étudié cette poésie. Henri Heine en a tiré de très beaux effets ; en France, on l’a, semble-t-il, un peu dédaignée. Mais on y reviendra.

— N’est-ce pas là un peu, dis-je, l’esthétique de votre œuvre ?

— Oui, un peu. Je crois, en effet, avoir trouvé dans un retour à la tradition nationale, surtout dans l’étude de la poésie populaire française, une source presque intarissable de rajeunissement poétique, quelque chose en tout cas de plus sûr que les fantaisies, d’ailleurs parfois fort curieuses, des symbolistes. Mais je