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SUR L’ÉVOLUTION LITTÉRAIRE

fond, le plus vrai, le plus émouvant, là aussi la langue est plus saine, plus française, le vers plus solide et d’un nombre plus saisissable. Je citerai, par exemple, les magnifiques vers qui terminent Sagesse :

C’est la fête du blé, c’est la fête du pain…

» Cela n’empêche pas d’être fort sensible aux délices de l’impair et à l’impressionnisme délicat de Verlaine. En tout cas, je préfère de beaucoup les livres que j’ai cités à la Bonne chanson et aux Fêtes galantes, œuvres exquises mais d’une portée bien moindre, d’un accent moins fort et d’un ton moins individuel. Il est vrai que, dans les derniers livres de Verlaine, le vers est souvent très dégingandé, la langue molle et imprécise ; mais ce qu’ils contiennent de moins bon, c’est encore bien savoureux, et il y règne parfois une absurdité délicieuse.

» Comme je vous l’ai dit précédemment, je n’ai pas l’intention de juger le groupe symboliste, — composé, sans doute, de gens qui bientôt tireront chacun de leur côté, et dont les uns auront du talent, tandis que les autres n’en auront pas. Mais pour avoir la joie d’écrire un nom qui m’est cher, et qui, je pense, n’a pas figuré encore dans votre enquête, je déclare que je donnerais toutes les productions, à moi connues, de nos symbolistes, pour n’importe laquelle des chroniques rimées de Raoul Ponchon. Je n’offenserai pas