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SUR L’ÉVOLUTION LITTÉRAIRE

hors de la littérature, au contraire ! Mais les seuls parmi les naturalistes de qui l’œuvre doive se survivre sont ceux qui ont transfiguré la vie.

Prenez Germinal ; c’est une synthèse démesurée et tragique, et l’assemblée dans la forêt est ample comme un fragment d’épopée. Quant aux naturalistes selon la formule, je les trouve de médiocres cervelles, fort rudimentaires et semblables pour l’intelligence à la bête Catoblépas qui se dévore les pieds sans s’en apercevoir. Des poètes ! mais dans ce siècle, qui donc fut plus grand que les poètes : Hugo, qui domine le monde et qui reste le Père ; de Vigny, Baudelaire, Lamartine, Théodore de Banville, — et maintenant, notre sévère et vénéré maître Leconte de Lisle, et Léon Dierx, et J.-M. de Hérédia, et Stéphane Mallarmé et Catulle Mendès…

Comme je n’étais pas très habitué à ces nuances de dithyrambe, et que je souriais un peu, d’un air étonné, M. Quillard me dit :

— Vous vous étonnez que nous admirions Hugo ? Mais c’est l’ancêtre qu’on ne déracinera point et nous ne sommes point complices de Jules Lemaître ni des attaques savantes et détournées d’Anatole France et de quelques autres esthètes. — Anatole France, il est vrai, est plus qu’un esthète, il a écrit des livres exquis et Thaïs est un conte délicieux, même quand on a lu Hroswitha, abbesse de Gandersheim, la Tentation de saint Antoine et les Rêveries d’un païen