Page:Huret - Enquête sur l’évolution littéraire, 1891.djvu/341

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
315
SUR L’ÉVOLUTION LITTÉRAIRE

curiosité banale qui s’éparpille sur des choses si contraires. On effleure tout, on ne va au fond de rien, et toutes les nouveautés un peu bizarres nous attirent… La critique subit l’influence de cet ennui universel, Anatole France fait une invraisemblable gageure, et il la gagne. Brunetière lui-même, Brunetière, ce préfet de police de la littérature ! il s’embarque aussi, donne son avis, compromet la Revue des Deux-Mondes ! Comment voulez-vous expliquer autrement des phénomènes pareils ?

— Le symbolisme vous paraît-il être une suite, une conséquence du Parnasse ?

— Peuh… Peut-être. Pas une suite naturelle, ni nécessaire, pourtant ! Mais ils se réclament de Mallarmé et de Verlaine, qui sont en effet de nos amis du Parnasse. Mallarmé a fait autrefois des vers très compréhensibles, de beaux vers ; mais je dois le dire, malgré toute l’estime que j’ai pour son esprit élevé, sa vie si pure, si belle, à présent je ne le comprends plus. Verlaine, lui, a écrit les Poèmes saturniens et les Fêtes galantes qui sont d’un poète parnassien ; depuis, malgré de belles choses, sa langue désarticulée et balbutiante, cette recherche pas naturelle de naïveté enfantine, donnent à sa littérature l’aspect d’un vieillard qui voudrait retrouver le parler de sa prime enfance…

Quant à leur technique du vers, Mendès vous a dit ce qu’il y avait à en dire, et ce n’est pas la peine d’y