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ENQUÊTE

quelque chose comme le panache ou la frange d’écume qui parachève, avec un fracas de tonnerre ou un murmure délicieux, le déferlement d’une belle lame !

Mais pour notre nouvelle école tout cela ne compte pas ! Ils mêlent arbitrairement les rimes féminines et les rimes masculines, ils font rimer des mots à cinq ou six vers de distance, ils emploient des rimes fausses, ils ne riment pas du tout, ils font des assonnances… Bast ! qu’importe si l’œil et l’oreille s’y perdent ! C’est du symbolisme.

— Alors, selon vous, le symbolisme n’a pas d’avenir ?

— Je crois que cette tentative servira surtout au drame lyrique. Ils feront des vers qui pourront être mis en musique et qui seront moins fastidieux que ceux des opéras d’à présent. Mais alors, c’est que leur vers n’aura plus sa musique propre. En effet, le vers, quand il est beau, renferme sa musique en soi et il est impossible de le revêtir d’une harmonie étrangère : la preuve en est faite avec les vers d’Hugo et de Leconte de Lisle qu’on n’a jamais pu mettre en musique. Ils auront obtenu là un résultat assez inattendu, mais qui s’explique lorsqu’on sait que la plupart des jeunes symbolistes sont très férus de musique wagnérienne.

— Vous admettez donc que le mouvement symboliste doit quelque chose à l’influence de Wagner ?