Page:Huret - Enquête sur l’évolution littéraire, 1891.djvu/325

Cette page a été validée par deux contributeurs.
299
SUR L’ÉVOLUTION LITTÉRAIRE

âmes, dont le cœur tourmenté des hautes idées de néant et d’infini se soulève à chaque instant, se gonfle et rugit comme un Maëlstrom !

— On a dit aussi que le symbolisme était un produit du wagnérisme ?

M. Mendès se met à rire, et s’écrie de toutes ses forces :

— De Wagner, qui obtient tous ses effets grâce à l’intensité formidable de ses sensations ! de Wagner, le classique par excellence ! qui emploie jusqu’à l’abus les moyens et les conventions que lui offre son art pour arriver à des émotions nouvelles, qui ne se sert pas d’un instrument dont Lecocq ne se serve, qui n’use pas d’un accord qui ne soit autorisé par les solfèges ! Mais Wagner, c’est justement le contraire de l’esprit anarchiste ! Il est pour l’expression directe de la passion, et jamais il ne cherche la petite bête ! Si son œuvre est symboliste, c’est comme l’est l’Apocalypse, pas autrement.

On veut aussi mettre Villiers de l’Isle-Adam dans le symbolisme… lui qui se serait fait pendre plutôt que d’écrire un vers qui n’eut pas été régulier, qui aurait plutôt compté sur ses doigts ! C’est comme Mallarmé, qui n’a jamais rompu une césure de sa vie ! Mallarmé, je l’ai dit quelquefois, c’est ce qu’on appelle en classe un auteur difficile ; mais quel esprit élevé, ingénieux et pur, et qui ne se trompe jamais ! Mais Verlaine non plus n’a rien de commun avec eux,