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SUR L’ÉVOLUTION LITTÉRAIRE


— Adopterez-vous une formule ?

— Nous laissons cela aux classiques, aux plagiaires. Nos maîtres, Benjamin Constant, Stendhal, Balzac, Michelet, Sainte-Beuve, et, plus récemment, Flaubert, Taine, les Goncourt, Vallès, Daudet, Zola, emploient, chacun, des moyens de réalisation personnels. Ceux de Flaubert varient même avec les œuvres, ainsi qu’il convient. Car, dès qu’un artiste a une manière, il s’imite lui-même ; et c’est aussi infécond, ou plus, que si un autre l’imitait.

— Parmi ceux que vous venez de nommer, fis-je remarquer à M. Caraguel, — il est de vos maîtres qui s’accordent à tenir pour interrompu, sinon pour fini, le mouvement qu’ils illustrèrent…

— Peut-être le désirent-ils par une vanité qui serait de leur âge ! Mais, l’œuvre de libération spirituelle qu’ils s’honorèrent de poursuivre après tant de génies, est à jamais le devoir de tous.

— Pourquoi préféreriez-vous l’étiquette de positiviste ?

— Pour rendre sensible notre collaboration à l’effort de l’humanité tout entière, à l’ascension civilisatrice par et vers la vérité. Notre art, — que l’on pourrait définir : Le vrai devenu le beau — doit moins à notre valeur propre, si grande soit elle, qu’à l’apport des siècles, à la concentration de connaissances qu’il esthétise. Loin de se croire l’antagoniste de la science, il se sait un de ses à peu près, son avant-garde. C’est