Page:Huret - Enquête sur l’évolution littéraire, 1891.djvu/235

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
209
SUR L’ÉVOLUTION LITTÉRAIRE

d’artifice multicolores, nos feux de bengale, à nous autres de Pont-de-l’Arche. Ici j’ai planté des Eccremocarpus qui grimperont aux arbres et rejoindront ces Boussingaultia et ces Lophospermum, ce sera comme une adorable pluie de fleurs qui se serait arrêtée à deux mètres du sol. Et partout, ici, là-bas, des Heliantus, ces immenses soleils qui s’épanouissent à deux et trois mètres de hauteur, et que Van Gogh a peints passionnément, des énormes Eremostachys les divins lys du Japon, des Iris Germanica, plus beaux que les plus belles orchidées, un Moréas de la Chine, iridée magnifique à grands pétales oranges : qui vaut bien les Moréas d’Athènes, je vous assure ; là des pourpiers fastueux, de gigantesques Héléniums, et, sur cette pente, des pivoines, des citrouilles, des Hypericum pedestrianum, fleur cocasse s’il en fut jamais, et qu’il faut piétiner pendant une journée avec des souliers de maçon pour la voir fleurir ; et tant d’autres merveilleuses comme ces Dielztras[1] avec leurs tiges penchées où des cœurs roses sont pendus…

Avec un grand geste heureux et un éclair dans les yeux, il ajouta :

— Vous verrez, vous verrez tout cela cet été ! Ces fleurs, c’est plus beau que tout, plus beau que tous les poèmes, plus beau que tous les arts !

— Vous savez, continue M. Mirbeau, je n’ai rien d’intéressant à vous dire, mais j’espère que vous

  1. Note wikisource. — Jules Huret fait une erreur de transcription. Dans la lettre que lui a envoyée Octave Mirbeau des Damps, il faut lire Dicentra (nom populaire : cœur de Marie).