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ENQUÊTE

naturalisme ne consiste nullement à imprimer le mot de Cambronne en toutes lettres. Ce serait trop facile. Les romantiques, d’ailleurs, l’ont fait, bien avant nous. Et, si nous l’avons fait quelquefois nous-même, — moi tout le premier, dans une série d’articles spéciaux — ce n’est peut-être pas ce que nous avons fait de mieux. Dans tous les cas c’était pour rire, pour nous moquer d’une légion de confrères trop aimables, qui faisaient semblant de ne voir en nous que des « pornographes », des « vidangeurs », et autres aménités. Mais passons.

» Au contraire, le naturalisme est assez large pour s’accommoder de toutes les « écritures. » Le ton de procès-verbal d’un Stendhal, la sécheresse impopulaire d’un Duranty trouvent grâce devant lui autant que le lyrisme concentré et impeccable de Flaubert, que l’adorable nervosité de Goncourt, l’abondance grandiose de Zola, la pénétration malicieuse et attendrie de Daudet. Tous les tempéraments d’écrivains peuvent aller avec lui.

» Aussi le naturalisme n’est-il nullement une secte, une confrérie, une école, un clan, une franc-maçonnerie, une chapelle. On n’y entre pas comme dans un moulin, ou à la brasserie. On ne s’y présente pas comme à l’Académie ou aux Mirlitons. Du naturalisme éclate — et nous prend au cœur — à chaque page même de Salammbô, comme il reste du romantisme à foison dans Madame Bovary dans le suicide