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SUR L’ÉVOLUTION LITTÉRAIRE

vide ! À une époque où la production doit être si grande, si vivante, ils ne trouvent à nous servir que de la littérature poussant dans des bocks ; on ne peut même pas appeler cela de la littérature ; ce sont des tentatives, des essais, des balbutiements, mais rien autre chose ! Et remarquez que j’en suis navré ; car ils ne me gêneraient pas du tout, moi personnellement, puisqu’il n’y a pas un romancier parmi eux ; et je verrais volontiers ma vieillesse égayée par des chefs-d’œuvre ; mais où est-il, le beau livre ? Sont-ils d’accord pour en nommer un seulement ? Non, chacun le leur ! Ils en arrivent même à renier leurs ancêtres. Car, quand je parle ainsi, je n’entends viser ni Mallarmé, qui est un esprit distingué, qui a écrit de fort beaux vers et dont on peut attendre l’œuvre définitive, ni Verlaine, qui est incontestablement un très grand poète.

— Alors, maître, dis-je, la place est encore à prendre ? Qui, selon vous, la prendra ?

— L’avenir appartiendra à celui ou à ceux qui auront saisi l’âme de la société moderne, qui, se dégageant des théories trop rigoureuses, consentiront à une acceptation plus logique, plus attendrie de la vie. Je crois à une peinture de la vérité plus large, plus complexe, à une ouverture plus grande sur l’humanité, à une sorte de classicisme du naturalisme.

Mais les symbolistes sont loin de cette conception ! Tout est réaction dans leur système ; ils se figurent