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ENQUÊTE

semble plus efficacement contre les satisfaits. Dans cinq ans ou dans dix ans, il ne subsistera sans doute pas grand’chose d’un classement aussi sommairement improvisé, aussi arbitraire. Et cela se comprend, ce groupe symboliste, outillé d’esprits si divers et de nuances différentes, où l’on voit des romanciers satiriques et mystiques comme Paul Adam, des esprits synoptiques comme Kahn, des rêveurs latins comme Quillard, des parabolistes comme Bernard Lazare, des analystes comme Édouard Dujardin, et un critique comme Fénéon, est une force et représente quelque chose en effet, mais, fatalement, l’heure venue, il s’égaillera à travers toutes les spécialités, selon les goûts, les aptitudes et compétences de chacun.

Les écoles littéraires ne profitent qu’à ceux pour qui l’isolement serait dangereux. Un esprit fortement constitué vaut par lui-même et force l’attention du public par sa vertu propre. Prenons, par exemple, Vielé-Griffin qui est une des intelligences les plus complètes de ce temps et dont les livres décèlent à la fois une rare aptitude au dramatique et des dons lyriques admirables. Il n’en existerait pas moins si le symbolisme, — en tant qu’école, — n’existait pas. La beauté des vers de M. de Heredia n’est pas subordonnée à l’existence du Parnasse non plus !

Quant à moi, si je suis symboliste, ce n’est pas, — croyez-le bien, — par amour des écoles et des classe-