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SUR L’ÉVOLUTION LITTÉRAIRE

Et puis, où peut mener leur défaut de passion et de cœur ? Quoi de plus vain que ce perpétuel retour sur soi-même, que cet onanisme spirituel ? Ce qu’ils font, ces psychologues, ce n’est ni de la littérature, ni de la science, c’est de la vulgarisation. Et, ma foi, je les estime moins que les naturalistes ; ce ne sont ni des amis, ni des ennemis : ils ignorent jusqu’au sens de la poésie. Et quelle petite, mais extraordinaire subtilité a pratiquée là M. Barrès, le jour où lui, qui n’aime ni ne comprend la poésie, a écrit cet article sur Moréas !

Quand je demande à M. Charles Morice s’il entend être classé dans l’École symboliste, il répond vivement :

— Il faudrait d’abord qu’il y en eût une. Pour ma part, je n’en connais pas. Moréas et moi, entre autres, avons plusieurs idées communes, et le mot poésie nous ralliera toujours, mais je ne pense pas que Moréas ait une suite. Ce que nous cherchons tous les deux, personnellement, est différent ; et je crois qu’on perdrait bien du temps à faire ce qu’il entend par la « renaissance romane » ; si une renaissance doit se faire, elle se fera par le pur effet de notre production à tous. Je comprends qu’on souhaite un renouveau de la langue, c’est-à-dire qu’on tâche de ressusciter des mots du moyen âge, perdus et utiles, qu’on en prenne même aussi dans l’argot et dans le patois, comme