Page:Huot - Le trésor de Bigot, 1926.djvu/48

Cette page a été validée par deux contributeurs.
46
LE TRÉSOR DE BIGOT

tive, qu’il faut me fier au parchemin. Il ne me fera pas faire fausse route. Le père Latulippe dit que ce n’est pas loin ; le papier déclare qu’il y a 512 pas. Mais je me demande comment il se fait que les descendants de Marcel Morin n’ont pas découvert le trésor. Le parchemin était pourtant facile à déchiffrer. Sans doute ils ne s’étaient jamais doutés que ce morceau de papier avait une relation quelconque avec le trésor de Bigot. Là était l’explication. Et puis, les mots : « Ici est le salut de la Nouvelle-France » étaient peut-être un mystère pour eux.

Jules obliqua dans le même chemin qu’il avait suivi l’après-midi à la poursuite de Tricentenaire et prit le « Petit St-Henri ».

Il résuma la situation :

— Jean Labranche avait le bout de parchemin. Ce document lui permettait de savoir que le trésor était près de la fosse du noyé. Mais il n’avait pas le père Latulippe pour lui révéler le secret de la fosse. Le détective avait donc l’avantage sur son adversaire, car il avait une copie du parchemin et le père Latulippe était à sa disposition. Tout allait bien.

À ce moment il stoppa près de l’endroit où il s’était arrêté l’après-midi.

Son chien sauta à terre.

— Café, murmura-t-il à l’oreille de l’animal, pas un aboiement. Sois tranquille, tranquille. Je compte sur toi pour me sauver s’il m’arrive malheur. Ce ne serait pas la première fois que tu me sauves la vie, mon bon Café.

Le détective se rappela alors plusieurs instants où son fidèle Café lui avait été d’une grande utilité et avait même protégé son existence en danger.

Le détective et l’animal prirent la direction de la caverne.


XV

LE CHIEN CAFÉ


Les ténèbres de la nuit sans lune étaient déjà moins opaques quand Jules Laroche arriva sur la crête du cap, près du sentier qui conduisait à la caverne, suivi de son fidèle Café.

Le chien humait l’air et avançait discrètement, se gardant bien de faire entendre le plus léger aboiement.

Avant de s’engager dans le sentier, Jules se pencha de nouveau sur le chien et lui parla à l’oreille. Le détective avait l’habitude d’en agir ainsi avec Café. L’animal semblait comprendre ce que son maître lui disait. Son instinct le guidait sans doute, et presque toujours sûrement.

— Café, murmura-t-il, prête toute ta bonne oreille de chien et écoute mes conseils. Je ne veux pas un aboiement, pas un bruit. Cache-toi toujours. Si je suis pris dans de mauvais draps, je te dirai quoi faire.

La bête dut remuer sa longue queue dans les ténèbres. Elle se frôla contre le détective qui lui caressa la tête.

Puis ils s’engagèrent tous deux dans le petit sentier.

Une faible lueur sortait de la caverne.

— Il y a quelqu’un, pensa le détective. Je n’ai pas de veine. Moi qui croyais pouvoir explorer la caverne et découvrir les bijoux, les objets de toutes sortes volés par les bandits ! Mais allons toujours voir.

Plus prudemment que jamais, le détective continua la descente.

Malheureusement, il ne vit pas un bandit posté en faction à l’entrée de la caverne.

La sentinelle l’avait bien remarqué.

Immédiatement, le détective entendit ces mots prononcés d’une voix rude :

— Qui va là ?

Jules caressa Café pour lui enlever tout désir d’aboyer, puis répondit :

— Un ami.

— Le mot de passe, ordonna l’autre, et vite !

Le détective se rappela la scène de l’après-midi et le mot de passe dont s’était servi Champlain lui revint à la mémoire. Il répondit d’une voix aussi calme et assurée que s’il se fût trouvé causant, chez lui, dans son cabinet de travail :

— Madeleine.

— Ce n’est pas tout.

— Non, je le sais. Mais il y a le « Trésor de Bigot ».

La sentinelle dit alors moins rudement.

— Tu es en règle, copain. Entre.

Mais le détective était prudent :

— Es-tu seul ici ? questionna-t-il.

— Oui, je garde les objets. Les autres sont au « Cheval de Bois », dans le Cap Blanc. Mais ils ne tarderont pas à venir.

Ils entrèrent à la caverne.

Le bandit éleva son fanal à la hauteur du visage de Jules Laroche pour contempler ses traits.

— Mais je ne te connais pas, dit-il, déjà soupçonneux.

Le détective s’efforça de rire :

— Non ! Je comprends cela, mon vieux. Ce n’est que d’aujourd’hui que je fais partie de la bande. J’ai été le camarade d’études du chef. Jean Labranche et moi, nous avons étu-