cher du soleil, c’est l’endroit où mes guerriers devaient me retrouver après avoir chassé le castor. Si tu n’aperçois pas de nos amis, allume cinq branches ; chaque branche représentera un de nos canots. Immédiatement après les avoir allumées, éteins-les l’une après l’autre. C’est notre signal. Attends une demi-heure, et si tu n’as pas de réponse à notre signal, reviens vers moi.
— Je ferai comme tu le désires, dit la jeune fille avec résolution. Mais si tes guerriers répondent à mon signal, que ferai-je ensuite ?
— Prends-en douze avec toi. Venez, sans vous laisser voir, jusqu’à la partie de la palissade qui fait face à cette fenêtre. Que quelques-uns des guerriers creusent, sous la palissade, un trou assez grand pour donner passage à un homme. Que deux des guerriers viennent me trouver et apportent un rouleau de corde et trois tomahawks ; que l’un d’eux monte jusqu’à la grille et me passe le tomahawk au moyen de la corde. Je réponds du reste. Mais te rappelleras-tu tout cela, Isanta ?
— C’est facile à retenir, mais est-ce tout ce que tu demandes de moi ?
— Non. Encore un mot. Tu te rappelles l’homme qui t’a porté le petit rouleau d’écorce t’indiquant où je me trouvais ?
— Je le connais. C’est mon ami.
— C’est un brave. Il t’aime et haït le Serpent. Avant de te rendre à l’ormeau, vois cet homme. Répète-lui ce que je viens de te dire et emmène-le au lac. Si mes guerriers répondent au signal, envoie cet homme mettre le feu aux huttes des Abénaquis. Cela les occupera et mes guerriers ne seront pas observés.
— Mais, frère, si les Français découvrent que Tambour a fait ce tort à leurs alliés, ils le mettront à mort.
— Ils ne l’attraperont pas. Il me suivra. Il deviendra un des nôtres.
— Comment sais-tu cela ?
— Parce qu’il t’aime et te servira partout.
— Hélas ! reprit tristement la jeune fille, s’il savait tout, il ne risquerait pas sa vie pour me servir.
— Et pourquoi pas ? interrompit le chef. Aucune des filles des faces pâles n’est plus belle qu’Isanta.
— Je ne puis pas tout te dire. Mais j’espère que Tambour ne courra aucun danger. Ce serait pitié de faire souffrir un brave pour rien.
— Isanta, tu parles comme une enfant. Je connais les hommes ; Je te dis qu’il n’y a pas d’homme meilleur et plus brave que Tambour. Il ne porte pas les vêtements les plus riches ; mais aimes-tu mieux le peuplier avec son enveloppe argentée que le chêne avec sa rude écorce ? Je n’en dirai pas davantage. Pars maintenant et bonne chance !
— Mais que faire, si je ne réussis pas ?
— Viens me trouver.
— Que feras-tu si tu échoues ? Rappelle-toi que rien ne peut t’arracher à la vengeance du Serpent !
— Si tu échoues, j’ai encore deux autres moyens de m’échapper. Mais le temps est précieux ; adieu donc, pour le moment.
Le chef huron embrassa encore une fois sa sœur, qui, d’un pas léger et le cœur résolu, quitta la cellule et commença à faire ses préparatifs.
À la nuit tombante, la cellule s’ouvrit et un soldat armé d’un mousquet et portant une lanterne, entra et se mit en faction tenant le dos tourné à la porte. C’était le plus terrible désappointement qu’il eût éprouvé depuis qu’il était prisonnier. Toutefois, il se décida à questionner le fonctionnaire :
— Le guerrier français est-il venu ici pour mettre le Huron à mort ?
D’un air étonné, le soldat répondit :
— Le soldat français ne tue pas l’homme qui est sans armes.
— Alors pourquoi vient-il ici ?
— Pour te garder de peur que tu ne t’évades.
— Il n’y a ici aucune chance d’évasion ; je suis sans armes et les murs sont épais.
— C’est vrai, mais le Serpent a dit au gouverneur que tu as plus de ruses que cent hommes réunis, et qu’il serait bon d’envoyer un soldat pour te garder.
— Pourquoi le Serpent n’est-il pas venu lui-même ?
— Aucun sauvage n’a le droit d’entrer au Fort après le coucher du soleil, répondit le soldat.
— À quelle heure va-t-on m’exécuter ?
— Au lever du soleil, et je reste ici jusqu’au moment de ton sup-