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LE MASSACRE DE LACHINE

échappé, mais il a donné le coup de mort au meilleur coureur des Abénaquis ; mais, ce qu’il y a de mieux, il a failli tuer aussi ce misérable Serpent.

— Qui était le prisonnier ? demanda Isanta avec anxiété.

— Il dit qu’il appartient à la nation des Hurons.

— À la nation des Hurons ! s’écria Isanta d’une voix tremblante d’émotion. Il faut que j’aille le voir, car il pourra peut-être m’apprendre quel est le sort de mon frère.

— Le prisonnier m’a chargé d’une commission, dit M. Tambour. Il m’a demandé s’il y avait une Huronne au Fort. J’ai répondu que j’en connaissais une, la plus jolie qui fût jamais (jetant un regard d’admiration à Isanta), et que je serais plus fier de lui porter un message que de recevoir du roi de France ma commission d’officier dans ses gardes de corps. » Et Tambour parlait évidemment de cœur en disant ces mots.

« De quel message le Huron vous a-t-il chargé pour moi ? demanda Isanta d’un ton à la fois inquiet et impatient. Faites-moi d’abord part du message et j’écouterai ensuite vos beaux compliments.

— Je vois, dit Tambour avec un air de désappointement, que vous vous souciez plus du message que du porteur. Mais je ne vous blâme pas, Isanta ; il est naturel que vous songiez plutôt à l’un des vôtres qu’à un étranger. Voici donc le message ». À ces mots, Tambour tira de sa poche un petit rouleau d’écorce de bouleau qu’il remit à la Huronne.


Il lui présenta un rouleau d’écorce de bouleau.

Isanta l’ouvrit rapidement, l’examina quelques secondes, puis le laissa tomber en s’écriant : « Le prisonnier est mon frère, le grand chef Huron, Hendiarack ! »

Tambour ramassa le morceau sur lequel était tracé un cercle dans lequel était enfermée la grossière image d’un rat.

— Expliquez-moi ce mystère, M. Tambour, dit Julie du Châtelet à la fois surprise et alarmée.

— Pas maintenant, pas maintenant, reprit la Huronne agitée ; venez avec moi, dit-elle à Tambour en lui prenant le bras.

— Isanta, Isanta, dit Julie d’un ton suppliant, attendez que M. de Callières arrive ; il pourra peut-être sauver votre frère.

— Je ne saurais différer un seul instant. Je l’attends depuis dix longues années et je ne puis désobéir à la voix des miens.