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SAGESSE ET FOLIE


Vers vous je viens, ma chère, en véritable amie ;
Inquiète je suis de vous, de votre vie !…
Chacun dit, et je sais que toujours l’air rêveur,
Vous allez au hasard, qu’un souffle vous fait peur.
Sans mot dire, écoutant d’un air presque stupide
Des chants bruyants tout comme un courant d’eau limpide ;
Pour être claire enfin, souvent votre raison
Pour tous n’est qu’un vain mot nullement de saison.

D’où vient cet air rêveur ? Pourquoi donc fuir le monde,
Dédaigner la parure, aimer la nuit profonde ?
À nos plaisirs pourquoi préférer vos pinceaux,
Vos bouquins, vos papiers ? Mieux vaudrait des fuseaux !
Vous m’indignez parfois. Je voudrais, jeune et belle,
Vous voir dans nos salons couverte de dentelle.
Que vous sert d’être femme ? Ah ! je vous plains vraiment,
Car tout en vous, ma chère, étonne assurément…

La femme est une esclave avant tout qui doit plaire,
Craindre le préjugé, près d’un mari se taire.
Les hommes font les lois, il faut les respecter,
Croire ce qu’ils disent, ne point s’inquiéter
S’ils ont tort ou raison : vous devez vous soumettre !
Suivez donc mes leçons, et veuillez me promettre
De réformer vos goûts, d’être soumise un jour,
Et d’être femme enfin, je le dis sans détour.