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sur le Luxe.

Ce qu’on ajoute aux simples nécessités de la vie, les recherches & les délicatesses qu’on apporte dans les plaisirs permis, sont un luxe ; mais ce luxe, innocent en lui-même, est cependant dangereux, & peut même être regardé comme un vice, lorsqu’il absorbe toute la dépense d’un citoyen, & le met hors d’état de remplir les devoirs que sa fortune & son état exigent de lui. Supposons qu’un pere de famille, vivant dans les bornes de sa condition, au lieu d’employer tout son revenu à des dépenses de faste & de plaisir, le partage avec ses enfans, auxquels il donne une excellente éducation, avec ses amis qu’il aide dans leurs besoins, & avec les pauvres qu’il secourt dans leurs nécessités ; il n’en résultera certainement aucun préjudice pour la société ; il s’y fera, au contraire, la même consommation. La portion de travail qui n’auroit été utile qu’aux plaisirs d’un seul homme, sera employée au soulagement de cent malheureux. La même somme d’argent dépensée pour forcer la nature & faire manger à un homme sensuel des fruits parvenus à leur maturité