sauver un million, mais nous pouvons craindre de voir le contraire, & qu’un million ne soit sacrifié au bonheur momentané de mille citoyens[1].
- ↑ Note de l’auteur.
Quelques personnes instruites assurent que le nombre des créanciers publics, tant naturels qu’étrangers, ne monte qu’à 17000 ; leurs revenus les mettent en état de tenir un rang considérable dans le monde ; mais dans le cas d’une banqueroute publique, ils deviendroient dans l’instant les citoyens les plus pauvres & les plus malheureux. La fortune & l’autorité de la noblesse & des pro-
payer, plutôt qu’à un honnête-homme ruiné ; par la raison
que le premier, voulant mettre ordre à ses affaires,
trouve son intérêt à se libérer lorsqu’il est en état de le
faire, ce qui n’est pas au pouvoir du dernier. Le raisonnement
de Tacite, vrai dans tous les tems, s’applique
très-bien à la matiere présente. Sed vulgus ad magnitudinem
beneficiorum aderat, stultissimus quisque pecuniis mercabatur.
Apud sapientes cassa habebantur quæ neque dari neque
accipi salvâ republicâ poterant.
Le public est un débiteur que personne ne peut obliger
de payer. Il n’est retenu vis-à-vis ses créanciers, que par
l’intérêt de conserver son crédit. Cet intérêt peut être aisément
contrebalancé par des dettes énormes & des conjonctures
extraordinaires & difficiles, en supposant même
que le crédit fût perdu pour toujours. D’ailleurs, il est des
cas où la nécessité présente force les états à prendre des
partis entiérement contraires à leurs intérêts.