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Essai

vengeance, que le plaisir n’a pas amolli, & qui n’exerce aucune profession dont l’exercice journalier lui procure un gain certain. Je pourrois ajouter encore, en faveur de mon sentiment, la grande égalité de fortune des habitans des anciennes républiques, où chaque citoyen possédoit sa piece de terre, & en tiroit la quantité de production suffisante pour sa subsistance & celle de sa famille ; ce qui rendoit la population de l’état extrêmement nombreuse, quoiqu’il n’y eût ni commerce ni manufactures.

Mais quoique le défaut de commerce & de manufactures puisse, dans quelques cas particuliers, augmenter la puissance d’un peuple libre & guerrier, il est cependant certain que, dans le cours ordinaire des choses, il en doit être autrement. Les souverains sont contraints de gouverner les peuples dans l’état où ils les trouvent ; & leur autorité, quelque grande qu’on la suppose, ne peut jamais l’être assez pour en changer entiérement les principes, les mœurs, & la façon de penser, & leur en substituer d’autres. Les grandes révolutions qui changent les mœurs