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sur le Crédit public.

Quelques tristes que soient ces deux événemens, on peut en prévoir un troisieme encore plus malheureux. Dans les deux premiers, mille citoyens sont sacrifiés pour en

    pendant toute apparence qu’il reparoîtroit quelques années après aussi florissant qu’auparavant. Les emprunts publics faits en France durant la derniere guerre, ont été à un intérêt plus bas que ceux du regne de Louis XIV, & à aussi bon marché que ceux qu’on a faits en Angleterre, proportion gardée du taux de l’intérêt établi dans les deux royaumes. Quoique l’expérience du passé ait communément plus de pouvoir sur la conduite des hommes, que ce qu’ils prévoient même avec une espece de certitude ; cependant les promesses, les protestations, les apparences séduisantes, & la jouissance du moment présent, ont une influence si puissante, que peu de gens ont la force d’y résister ; les hommes de tous les siecles ont été trompés & le seront par les mêmes amorces ; les mêmes tours d’adresse se répetent sans cesse & les séduisent toujours également. L’affectation de la plus grande popularité & du plus pur patriotisme, est la route qui conduit à la puissance & à la tyrannie ; la flatterie précede la trahison, & le clergé même n’est peut être occupé que de son intérêt particulier, lorsqu’il ne paroît agir que pour la gloire de Dieu. La crainte de ne pas voir revivre le crédit est une chimere inutile à combattre ; un homme prudent, en effet, prêtera plutôt au public immédiatement après la banqueroute, que dans le moment présent. De même qu’on préfere de prêter son argent à un fripon opulent, qu’on ne peut même contraindre à