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Essais

tour. Voilà pourquoi je souhaiterois qu’on ne prétendît à la supériorité ni de part ni d’autre, & que tout fût égal comme entre les membres que nous avons doubles. C’est dans la vue d’inspirer aux deux partis ces sentimens pacifiques, que je vais leur répéter le conte de Platon sur l’origine de l’Amour & du mariage.

Voici ce que nous apprend là-dessus ce philosophe, qui avoit l’imagination si brillante. Le genre-humain ne fût pas toujours divisé en mâles & en femelles, comme il l’est aujourd’hui. Au commencement chaque individu étoit un composé des deux sexes ; où l’homme & la femme fondus ensemble ne constituoient qu’une créature vivante. Il fallut que cette union fût bien parfaite, & que les parties se fussent ajustées avec beaucoup d’exactitude ; puisque, malgré le nœud étroit qui les joignoit, l’homme & la femme vivoient en si bonne intelligence. On peut juger combien l’harmonie & la félicité qui résultoient de ce mélange devoient être complettes, par l’effet qu’elles produisirent sur ces Hermaphrodites ou sur ces Ardrogunes,