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Essais

rentes, il peut, en suivant les maximes de l’Orient, ne laisser parmi ses sujets d’autre distinction que celle de sa faveur, elle seule réglera les rangs : dès-lors il n’y a ni titres ni possessions héréditaires, la naissance a perdu ses droits ; tout le crédit qu’un particulier peut avoir dans la nation, releve de la volonté de souverain. Un monarque peut aussi user de son pouvoir d’une maniere plus douce : nous en voyons l’exemple dans nos souverains de l’Europe. Sous leur domination, il y a des sources d’honneur ouvertes, qui ne dépendent point uniquement de la faveur ; la naissance, les titres, les biens, le courage, la probité, les connoissances, les grandes actions, les heureuses entreprises donnent une distinction qui n’est point empruntée du sourire du maître. Dans la premiere sorte de gouvernement, il est impossible au peuple, qui a été conquis, de secouer le joug, parce que personne n’a assez d’autorité ou de crédit personnel pour s’ériger en chef de l’entreprise ; au-lieu que dans la seconde le moindre désastre qui arrive aux vainqueurs, la moindre désunion qui naît