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devroit périr[1], est une fausse maxime, qui en sacrifiant la fin aux moyens renverse l’ordre de nos devoirs. Où est le commandant de forteresse qui se fasse le moindre scrupule de brûler les fauxbourgs, lorsqu’ils facilitent les approches de l’ennemi ? Où est le général qui hésite un moment de piller un pays neutre, lorsque la nécessité l’exige, & lorsque son armée manque de subsistance ? Il en est de-même du devoir de l’obéissance envers le magistrat : le sens-commun nous dicte que ce devoir ne nous oblige qu’en vertu de sa tendance au bien public : ainsi toutes les fois que l’obéissance seroit suivie de la ruine de l’état, on doit faire taire ce devoir, & n’écouter que l’obligation primitive & fondamentale. Le salut du peuple est la loi suprême[2]. Sentence consacrée dans tous les tems & dans tous les esprits. Y a-t-il personne qui en lisant l’histoire des soulévemens suscités contre un Néron, ou contre un Philippe, soit assez infa-

  1. Fiat justitia & ruat cælum.
  2. Salus populi suprema lex est.