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Moraux et Politiques

camarades. Des élections aussi irrégulieres, qui encore sont fort rares, seroient-elles d’un assez grand poids pour devenir la base solide du gouvernement & de la soumission des peuples ?

À dire vrai, rien n’est plus terrible qu’une dissolution totale du gouvernement, qui déchaîne, pour ainsi dire, la multitude, & fait dépendre le choix d’un nouvel établissement d’un nombre approchant de celui du peuple en corps ; car ce n’est pourtant jamais tout le peuple qui s’en mêle. Alors il n’y a point d’homme sage qui ne souhaite de voir à la tête d’une armée puissante & affectionnée un général qui se saisisse immédiatement de la proie, & qui donne un maître au peuple qui est si peu en état de s’en choisir un. On peut voir par-là combien la réalité du fait differe de ces nations philosophiques.

Que l’établissement qui a suivi la révolution ne nous en impose pas au point de nous rendre amoureux de cette origine philosophique du gouvernement, & de nous faire rejeter toute autre comme monstrueuse &