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Essais

un grand empire ; là, un grand empire se résout en des petits états : on forme de nouvelles colonies : des tribus entieres quittent leur pays natal pour en peupler un autre. Dans tous ces changemens voit-on autre chose que de la force & de la violence ? & où demeure ce consentement, cette association volontaire dont on fait tant de bruit ?

Les mariages & les cessions sont les voies les plus douces par lesquelles un peuple puisse recevoir un maître étranger, mais elles ne sont pas fort honorables ; elles supposent que l’on puisse disposer d’une nation comme d’un douaire ou comme d’un legs, selon le bon plaisir ou selon les intérêts du prince.

On pourroit croire que dans les royaumes électifs, la force ne s’en mêle pas, mais qu’est-ce que cette élection tant vantée ? C’est ou un accord fait entre les grands, qui décident pour toute la nation, & dont la volonté ne souffre point d’opposition : ou bien c’est le tumulte d’une populace qui suit un chef de sédition, à peine connu d’une douzaine d’entr’eux, qui doit son élévation à son impudence, ou au caprice momentané de ses