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Moraux et Politiques

mat puissent décider du tempérament & du caractere. J’avoue que la probabilité ne paroît pas d’abord être de mon côté ; car enfin

    La plupart des hommes ont trop d’amour-propre, mais c’est aux écclésiastiques que ce vice offre les tentations les plus séduisantes ; à eux, dis-je, qui se voient si fort honorés & respectés, souvent même consacrés par le peuple stupide.

    Les gens de même profession ont beaucoup d’égard les uns pour les autres ; mais chaque jurisconsulte, chaque médecin, chaque marchand suit le train de ses affaires ; son intérêt n’est pas aussi étroitement lié à celui du corps donc il est membre, comme le sont les intérêts du clergé d’une même religion. Ici la vénération des dogmes établis, & la suppression des dogmes qui leur sont contraires, tournent au profit du collége entier.

    Les contradictions déplaisent à presque tout le monde, mais elles rendent souvent le clergé furieux. Tout son crédit & toute sa subsistance se fonde sur la foi que l’on accorde à ses opinions & comme il n’y a que lui qui s’arroge une autorité surnaturelle & divine, il a seul la ressource de taxer ses adversaires d’impiété & de profanation. La haine théologique a passé en proverbe pour désigner la haine la plus furieuse & la plus implacable.

    Le desir de se venger est une passion très-naturelle, mais particuliérement affectée aux prêtres & aux femmes ; ces deux sortes de personnes ne pouvant immédiatement exhaler leur colere par des actions d’éclat, sont toujours sujettes à croire qu’on les méprise, & leur orgueil augmente leur esprit vindicatif.