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Moraux et Politiques

VINGTIÈME ESSAI.

Le caractere des Nations.

Les hommes, pour l’ordinaire, sont extrêmes dans les jugemens qu’ils portent sur le caractere des nations, & ils étendent leurs principes à tous les individus dont ces nations sont composées, sans admettre aucune exception : à les entendre, cette contrée ne produit que des ignorans, cette autre que des lâches, une troisieme que des fripons. Si les personnes raisonnables condamnent cette façon de penser, ce n’est pas qu’elles ne conviennent que certaines qualités soient plus affectées à une nation qu’aux autres. On trouve assurément plus de probité chez le commun-peuple en Suisse qu’en Irlande : l’idée de François comporte plus d’esprit & de belle humeur que celle d’Espagnol, quoique Cervantes fût ne en Espagne : les Anglois passent en général pour être plus savans que les Danois, quoique Tycho-Brahé ait été natif du Dannemarc.