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Moraux et Politiques

Je reviens de ma digression, & je finis par une quatrieme remarque. Du moment où les arts & les sciences ont atteint, dans un état, leur dernier degré de perfection, ils commencent à décliner : cette décadence est naturelle ou plutôt nécessaire, & il n’arrive jamais, ou du-moins il est bien rare que les arts & les sciences renaissent dans les pays qui autrefois les avoient vû fleurir.

Je conviens que cette maxime, quoique conforme à l’expérience, doit paroître peu raisonnable au premier abord. Si comme, je le crois, le génie naturel des hommes est à-peu-près le même dans tous les tems, & dans toutes les contrées, qu’y a-t-il de plus propre à cultiver & à perfectionner ce génie, que d’avoir sans cesse devant les yeux des modeles exquis propres à former le goût, & à fixer les objets les plus dignes d’être imités ? N’est ce pas aux modeles qui sont restés de l’antiquité que nous devons la renaissance des arts, arrivée il y a deux siecles, & les progrès qu’ils ont faits depuis par toute l’Europe ? Et pourquoi sous le regne de Trajan & de ses successeurs, lorsqu’ils