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Essais

moral. Mylord Rochester n’est pas plus licencieux que le sont Ovide & Lucrece[1], quoique ceux-ci fussent gens de be| air & d’admirables écrivains, tandis que le premier, nourri au milieu des débordemens d’une cour corrompue, sembloit avoir abjuré toute pudeur. Juvénal prêche la modestie avec beaucoup de zele ; mais à en juger par l’impudence qui regne dans ses satires, il en est lui-même un très-mauvais modele.

Je dirai donc hardiment que les anciens avoient peu de manières, & ne connoissoient gueres cette déférence polie & respectueuse que la civilité nous oblige d’exprimer, ou du moins de contrefaire dans la conversation. Cicéron était certainement un des

  1. Ce poëte recommande un remede contre l’amour qui est des plus extraordinaires, & que l’on ne se fût jamais attendu de trouver dans un poëme aussi élégant & aussi philosophique V. Lib. IV. V. 1165. Cette idée paroît avoir suggéré au docteur Swift quelques unes de ses belles & décentes images. L’aimable Catulle, l’élégant Phedre ne sont pas plus irréprochables à cet égard.