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Moraux et Politiques

D’ailleurs, quand même le mécontentement seroit universel, il ne faut qu’un peu d’art pour retenir les peuples dans l’obéissance : la partie de l’état qui voudroit éclater, ignorant la résolution que prendront les autres, craindra toujours d’être la premiere à lever le bouclier. Pour ne point parler ici de cette vénération superstitieuse que la personne du prince inspire, naturelle surtout aux peuples qui ne voient que rarement leur souverain, dont plusieurs ne le connoissent pas, & par conséquent ne sauroient appercevoir ses foiblesses. Enfin les empires puissans fournissent abondamment aux dépenses nécessaires pour soutenir la pompe & l’éclat de la majesté : cet éclat fascine les yeux des peuples, & les retient dans l’esclavage.

Dans un petit état les injustices sont d’abord remarquées : le mécontentement & le murmure se communiquent par-tout ; & l’indignation qu’elles excitent, en est d’autant plus forte, que la distance qu’il y a entre le souverain & les sujets paroît moins grande. On n’est jamais héros, dit le prince