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Essais

s’appliquent à favoriser la culture des lettres. C’est que l’avarice ou le desir de gain est une passion universelle, qui opere en tout tems, en tout lieu, sur tous les hommes ; tandis que la curiosité ou l’amour des sciences n’a qu’une influence très-limitée, & demande de la jeunesse, du loisir, de l’éducation, du génie & de grands modeles, sans quoi elle ne sauroit ni éclore ni fructifier. Tant qu’il y aura des acheteurs de livres, on ne manquera pas de libraires ; mais souvent il y a des lecteurs, & il n’y a rien qui soit digne d’être lu. Le nombre des habitans, le besoin & la liberté ont donné naissance au commerce de la Hollande ; l’étude & l’application n’y ont produit que fort peu de bons écrivains.

Concluons donc que l’histoire des arts & des sciences est de tous les sujets celui qui doit être traité avec le plus de précaution : sans quoi nous imaginerons des causes qui n’ont jamais existé, & nous tomberons dans l’abus de vouloir réduire à des principes stables & universels les événemens les plus contingens. Dans quelque pays que ce soit, il n’y