Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 6, 1788.djvu/200

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
192
Essais

le premier, en faisant une fausse représentation du cas dont il s’agit, & en n’insistant que sur le côté foible de la nature humaine ; le second, en formant en nous-mêmes, un nouveau parallele entre l’homme & les êtres plus parfaits. Entre plusieurs avantages dont l’homme jouit, celui-ci sur-tout est remarquable ; c’est qu’il peut se former une idée de perfection fort supérieure à celle que sa propre expérience lui fait appercevoir en lui-même, qu’il peut toujours étendre ses idées de sagesse & de vertu, & concevoir ces qualités dans un degré qui, comparé à celui où il les possede, lui fera paroître ce dernier fort méprisable, & servira en quelque maniere à faire évanouir la différence qui reste encore entre lui & les animaux. Or tout le monde convenant que l’intelligence humaine est infiniment au-dessous de la perfection, il seroit bon de savoir, avant de disputer, si notre antagoniste ne fait pas secrétement cette comparaison, afin que nous ne disputions point, lorsqu’il n’y a aucune différence réelle dans nos sentimens. L’homme est beaucoup plus éloigné