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Essais

tems où des principes, qui lui étoient directement contraires, étoient établis par autorité publique, dans la partie policée du monde, dont la nation, qui la premiere avoit produit cette nouveauté, étoit généralement méprisée. Cela étant, il ne faut point être surpris qu’elle n’ait rencontré que peu d’obstacles de la part du magistrat, & que les prêtres aient eu tout le loisir d’affermir l’autorité qu’ils s’arrogeoient dans la nouvelle secte. Ils en abuserent déjà dans ces premiers tems, & peut-être est-ce au moins en partie[1] à l’esprit violent qu’ils avoient inspiré

  1. Je dis en partie. C’est une erreur vulgaire de s’imaginer que les anciens aient été amis de la tolérance, comme le sont aujourd’hui les Anglois & les Hollandois. Les loix romaines contre les superstitions étrangeres, sont aussi anciennes que les douze tables, & les Juifs, aussi-bien que les Chrétiens, ont quelquefois été punis selon la teneur de ces loix, Cependant on ne les exécutoit gueres à la rigueur. Immédiatement après la conquête des Gaules, on défendit à tous ceux qui n’étoient pas Gaulois, de se faire initier dans la religion des Druïdes, c’étoit déjà une espece de persécution. Environ un siecle après, l’empereur Claude abolit ce culte superstitieux par des loix pénales : ce qui eût été une persécution très-grave, si les Gaulois, se piquant d’imiter les