Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 6, 1788.djvu/119

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
111
Moraux et Politiques

les uns, il les gagnera par des services réels, & la plupart par les services qu’il leur fera espérer.

De-là vient que dans-tous les états libres, les particuliers fort riches ont toujours causé de l’ombrage ; quoiqu’il n’y eût aucune proportion entre leurs richesses & celles de l’état. Crassus, si je ne me trompe ne possedoit qu’un peu au-delà de 1600000. livres de notre argent[1]. Cependant ce ne fut pas par son génie, qui n’avoit rien d’extraordinaire, mais par ses biens, qu’il balança jusqu’à sa mort l’autorité de Pompée & de César ; ils ne purent devenir les maîtres du monde que lorsque Crassus eut cessé de vivre. C’est par ses trésors que la famille de Médicis s’empara du gouvernement de Florence ; & assurément ces trésors étoient fort peu de chose, comparés aux richesses de tous les habitans d’une république aussi opulente.

Ces considérations sont bien propres à

  1. Comme l’intérêt étoit plus haut à Rome que chez nous cela pouvoit faire à-peu-près cent mille livres sterling par an.