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Essais

Toutes les nations policées ont eu un soin particulier d’établir les loix de la propriété sur des vues générales qui fussent également avantageuses à tous les membres de la société. Elles en ont fait la base des jugemens & des décisions judicielles, proscrivant toute sorte de partialité ou de caprice arbitraire ; rien ne seroit plus dangereux que d’accoutumer les tribunaux à avoir égard, même dans les cas les plus légers, à des amitiés ou à des haines particulieres. Il est certain que si les hommes s’imaginoient que c’est la faveur seule qui dicte les arrêts des magistrats & des juges, ils ne manqueroient pas de concevoir contre eux la haine la plus envenimée. Ainsi lorsque la raison naturelle ne nous présente pas un point fixe d’utilité publique, d’après lequel on puisse décider une dispute sur la propriété, on est obligé d’établir des loix positives pour suppléer à ce défaut, & prescrire aux tribunaux de justice ce qu’ils ont à faire. Lorsque ces loix manquent elles-mêmes, comme cela arrive souvent, on a recours à ce qui s’est fait précédemment, & une décision anté-