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de Morale.

qui étoit entre eux deux, & d’après des circonstances innocentes & involontaires, il se forma des opinions erronées sur l’action qu’il avoit commise ; mais lorsque Néron fit mourir Agrippine, il connoissoit déjà & long-tems avant toutes les relations qui étoient entre elle & lui, avec toutes les circonstances de cette action féroce ; mais les motifs de vengeance, de crainte, d’intérêt, l’emporterent dans son cœur barbare sur les sentimens du devoir & de l’humanité ; si nous marquons pour ce monstre une horreur qu’il ne ressentit pas lui-même, parce qu’il sut bientôt l’étouffer ; ce n’est pas que nous appercevions aucun rapport qu’il ignorât, c’est que la bonté de notre cœur nous fait éprouver des sentimens contre lesquels il étoit endurci par la flatterie par l’habitude du crime. C’est donc dans ces sentimens, & non dans la découverte d’aucun rapport, que consistent toutes les déterminations morales. Avant que de rien décider en ce genre, il faut que nous ayions une notion sûre & distincte de l’objet, ou de l’action & de ses dépendances ; alors il ne reste plus rien à faire