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Dissertation

de sa cervelle mêlée avec son sang. Le théâtre Anglois n’offre que trop de ces dégoûtantes images.

Il n’y a pas jusques aux sentimens les plus communs de pitié qui pour donner une satisfaction complexe ne demandent à être tempérés par quelque affection agréable. Les plaintes & les gémissemens de la vertu oprimée, le triomphe de la tyrannie & du vice forment un spectacle qui déplaît, & que tous les grands maîtres de l’art dramatique ont soin d’éviter. Pour renvoyer les spectateurs satisfaits, il faut que la vertu se change en un noble désespoir, ou que le vice soit puni.

En jugeant les peintres d’après cette regle, il se trouvera, que la plupart d’entr’eux ont mal réussi dans le choix de leurs sujets ; travaillant pour les églises & les monasteres, ils se sont principalement exercés sur des scenes horribles, comme sont les martyres & les crucifictions : on ne voit dans leurs tableaux que tourmens, plaies, exécutions, en un mot que des souffrances passives, sans actions & sans sentiment. Détournent-