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Dissertation

ment que la passion imprime à l’ame lui communique un feu, une activité, une véhémence extraordinaire ; enfin, par la force de l’impression dominante, tout cela se transforme en plaisir. Ce n’est donc pas simplement en diminuant & en affoiblissant la tristesse que les fictions tragiques temperent les passions ; cela se fait plutôt par l’infusion d’un nouveau sentiment, si l’on me permet cette façon de parler. On peut affaiblir par degré une douleur réelle jusqu’à la faire cesser ; cependant dans aucune de ses dégradations vous ne sentirez du plaisir, à moins que ce ne soit par accident, comme il arriveroit, par exemple, à un homme plongé dans une léthargique indolence lorsqu’il viendroit à sortir de cet état.

Pour confirmer cette théorie, il suffira de produire d’autres exemples, par lesquels on puisse voir que les passions subordonnées se changent en la passion dominante, ou lui

    mens, le poëte n’a d’autre ressource que d’employer la tristesse, l’angoisse, la terreur ; une joie complexe produisant le repos & la sécurité, l’action cesse & l’intérêt s’éteint.