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sur les Passions.

voisins ; nous n’en pouvons rien conclure à notre avantage particulier, rien qui nous mette au-dessus de nos amis, ou des personnes de notre connoissance.

Nous flottons tous entre la maladie & la santé : il n’y a personne qui se porte toujours bien, ou qui soit toujours malade : ce sont-là des biens & des maux accidentels, que nous regardons, en quelque maniere, comme détachés de nous-mêmes, & qui ne peuvent ni nous enorgueillir, ni nous humilier. Cependant, lorsqu’une maladie est tellement enracinée dans notre tempérament que nous n’espérons pas d’en revenir, elle mortifie notre amour-propre : on le voit dans les vieillards ; rien ne les rend si chagrins que de penser à leur âge & leurs infirmités : ils cachent, aussi long-tems qu’il leur est possible, la foiblesse de leur vue & de leur ouïe, leur goutte & leurs fluxions, & n’en conviennent jamais sans répugnance : & quoique les jeunes gens ne se fassent point de peine d’avouer un mal de tête ou un catarrhe, il est pourtant sûr qu’en général on ne sauroit penser aux foiblesses où la vie hu-